Dans les années 1730, Benjamin Franklin, un des pères fondateurs des États-Unis, avait besoin du soutien d’un rival influent pour assurer sa réélection.
Le problème ? Ce rival ne l’aimait pas du tout. Froid, méprisant… Il semblait impossible à convaincre.
Alors, Franklin adopta une stratégie étrange.
Plutôt que d’essayer d’acheter l’amitié de son opposant avec des cadeaux ou des flatteries, Franklin lui envoya une lettre pour lui demander une faveur.
Il lui demanda s’il pouvait emprunter un livre rare de sa collection.
L’homme accepta, flatté de l’intérêt.
Après avoir rendu l'ouvrage accompagné d’une note de remerciement, Franklin remarqua que l'attitude de son opposant avait changé.
L’homme devint cordial et, avec le temps, les deux hommes finirent même par devenir amis.
Dans son autobiographie, Franklin résume cette expérience :
"Celui qui vous a rendu service est plus disposé à vous en rendre un autre qu’une personne que vous avez aidée."
Que s’est-il passé ?
🧠 Dissonance cognitive : comment ça marche ?
La dissonance cognitive, désigne la sensation désagréable que l’on ressent lorsque nos actions et nos croyances sont en contradiction.
Imaginez.
L’homme déteste Franklin. Pourtant, il lui prête un livre précieux.
Pour résoudre cette contradiction, le rival rationalise la situation en alignant ses actions et ses croyances.
"Pourquoi ai-je prêté mon livre à Franklin ? Peut-être que je ne le déteste pas autant que je ne le pensais… Peut-être même que je l’apprécie ?"
Deux psychologues ont étudié le phénomène.
Dans les années 1950, Leon Festinger et Merrill Carlsmith ont demandé à des participants de faire une tâche très ennuyeuse :
“Vous allez tourner ces chevilles en bois pendant une heure.”
Ensuite, ils ont payé certains 1 $, et d’autres 20 $ pour mentir en disant à la prochaine personne que la tâche était amusante.
Résultat :
Ceux qui ont reçu 20 $ n’ont pas ressenti de malaise : "Je mens parce que je suis bien payé, pas de souci."
Mais ceux qui n’ont reçu qu’1 $ ont ressenti un malaise : "Pourquoi est-ce que j’ai menti pour si peu ?"
Alors ces derniers ont fini par se convaincre eux-mêmes que la tâche était amusante !
On appelle ça la “réduction de la dissonance cognitive”.
💡 Comment les croyances influencent la communication ?
Bien communiquer est souvent délicat pour les entrepreneurs.
Quel est le bon mot à utiliser dans ma publicité ? Quel message touchera mon audience ?
C’est normal : la survie de votre entreprise dépend de votre capacité à persuader un client d’acheter votre offre.
Et justement, la dissonance cognitive est un puissant moteur pour pousser à l’action.
Mais si elle est mal maîtrisée, elle peut provoquer le rejet de votre message.
💥 La dissonance dans notre cerveau
À l'imagerie cérébrale, les chercheurs ont remarqué que la dissonance cognitive active principalement le cortex cingulaire antérieur dorsal (dACC) et l’insula antérieure. Ces régions sont associées à la détection des conflits cognitifs et aux émotions négatives.
Problème :
Lorsque votre client ressent une dissonance cognitive, il ressent des émotions négatives qui peuvent freiner la décision d’achat et susciter du rejet.
Votre objectif : il ne faut pas simplement créer une tension, mais aussi aider le consommateur à la résoudre.
🎓 Bien utiliser la dissonance cognitive en marketing
❌ Attention aux émotions négatives
Que se passe-t-il si le consommateur ne perçoit pas de solution face à un message qui génère une dissonance cognitive ?
Il rejette le message.
Exemple de mauvaise formulation :
Arrêtez d’utiliser votre voiture ! Ça pollue.
Ça ne fonctionne pas.
Parce que la personne pense “Je sais bien, mais j’en ai besoin pour aller travailler !”
Alors que faire ?
Assurez-vous de proposer une solution crédible et désirable :
"De plus en plus de personnes utilisent la navette gratuite pour venir au travail. Pourquoi ne pas essayer de l’emprunter une journée par semaine ?"
C’est bien mieux comme ça, pas vrai ?
Maintenant, on va voir 3 techniques pour exploiter les croyances de votre audience pour doper les ventes.
Technique n°1 : Donner une justification à leurs achats
Lors du Black Friday, Patagonia a lancé une campagne choc, demandant à ses clients de ne pas acheter son produit.
Message implicite :
"Vous vous dites écolo, mais consommez encore trop. Engagez-vous à acheter moins et mieux."
Résultat ?
Une augmentation des ventes de 30%.
Avec cette publicité, Patagonia a renforcé son image et ses engagements environnementaux, tout en décomplexant les acheteurs de passer à l’action.
Donnez une bonne raison d’acheter.
Par exemple :
"J’ai craqué pour ce sac, mais il était en promotion, donc j’ai économisé de l’argent."
Ou encore :
"Ce donut ne va pas ruiner mon régime, j’ai mangé sain toute la semaine... Je mérite bien ce petit plaisir."
Par exemple, l’Oréal est le leader de la cosmétique mondiale et représente un chiffre d’affaires de 41 Milliard € en 2023.
Son slogan ?
En donnant une bonne raison d’acheter, votre client se sent beaucoup plus libre de passer à l’action.
Technique n°2 : Identifier les croyances d’une audience
Le publicitaire David Ogilvy disait :
“Les gens ne pensent pas ce qu'ils ressentent, ils ne disent pas ce qu'ils pensent et ils ne font pas ce qu'ils disent."
Vous ne pouvez pas demander explicitement à votre audience quelles sont leurs croyances, parce qu’ils ne savent pas bien les identifier.
Mais vous pouvez les déduire à partir de leurs comportements en posant les bonnes questions.
Question 1 :
Qui sont vos créateurs de contenus préférés ? Et ceux que vous n’aimez pas ?
Question 2 :
Quels sont les 3 derniers produits que vous avez achetés ? Comment vous servent-ils au quotidien ?
J’aime beaucoup poser ces 2 questions parce qu’elles :
Observent ce que les gens font et pas ce qu’ils disent
Évitent le biais des réponses "people pleaser”
Révèlent les croyances implicites
Technique 3 : Féliciter le client après son achat
Après un achat, le consommateur peut ressentir une dissonance cognitive (= "Buyer’s remorse") :
"Ai-je vraiment besoin de ce produit ? Ai-je fait le bon choix ?"
Une bonne communication post-achat peut aider à réduire cette dissonance et à transformer un client hésitant en un ambassadeur loyal.
Stratégie :
Envoyez un email de remerciement : "Bravo pour votre achat, vous venez d’acquérir la meilleure machine à laver de la catégorie 'lavante-séchante'."
Offrez un bonus ou une astuce d’utilisation : "3 conseils pour profiter au maximum de votre produit."
Rassurez en cas de mécontentement : "Si vous n’êtes pas satisfait, vous pouvez retourner votre produit gratuitement sous 30 jours."
Exemple :
Apple valorise ses clients en leur faisant sentir qu’ils ont rejoint une élite de créatifs et de penseurs innovants.
🙅♂️ Comment utiliser la dissonance cognitive sans paraître manipulatoire ?
C’est probablement un faux problème.
Parce qu’en réalité, les gens ne pensent pas beaucoup à leurs attitudes.
Par exemple, combien de fois avez-vous reçu des conseils de santé de la part d’un fumeur ? Plus d’une fois, j’en suis certain.
Concrètement, les gens ressentent un malaise quand ils sont mis face à leurs contradictions.
Si le consommateur tombe sur un message de ce type, il va :
Ignorer le message publicitaire qui ne lui plaît pas
Justifier son comportement par une pirouette intellectuelle
Voilà pourquoi il est très difficile de faire changer d’avis quelqu’un.
Si on essaye, on se heurte à un mur à cause du mécanisme réactance psychologique (= notre cerveau est vigilant contre les tentatives d’influence).
En réalité, un bon marketeur n’essaye pas de faire changer d’avis sa cible, mais plutôt d’identifier une croyance qu’elle a déjà pour lui proposer une solution désirable.
Résumé :
Bien appliquer la dissonance cognitive dans vos messages fait la différence entre une vente ou un rejet.
Assurez-vous de proposer une solution crédible pour apaiser la dissonance cognitive.
Donnez des justifications d’achat pour réduire la dissonance cognitive au moment d’acheter.
Identifiez leurs croyances en posant des questions pour découvrir ce qu’ils font.
Félicitez votre client après son achat en lui confirmant qu’il a fait le bon choix.
👋 Merci de lire Insight. Likez cette édition si elle vous a plu, ça m’aide beaucoup à comprendre ce que vous aimez.
Clément